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Il n’y aura pas d’apaisement. Retour sur la manif sauvage du 17 avril


Ce soir d’allocution présidentielle, nous étions un peu plus de 500 personnes à décider de se retrouver plutôt devant la mairie de Bordeaux que devant nos écrans. Le dialogue de sourds avec lui-même que Macron propose a provoqué hier soir un regain d’intensités et de joies politiques dans la rue. Voici un récit de cette soirée.

Face au passage en force du pouvoir en place, nous sommes nombreux.se.s à nous être rassemblé.e.s pour un vibrant concert de casseroles et de poëles à presque réduire en poussière la porte brulée de la mairie. Ces musiques endiablées rappellant des cris d’oiseaux survoltés se sont alors élancées en sauvage, car même si c’est magnifique de taper du tambour, il nous faudra bien plus que ça pour faire tomber le gouvernement et sa police.

Un petit feu de poubelle commnence déjà à brûler au centre de la place de l’Hôtel de Ville en partant, annoncant la marche à suivre pour le cortège. Nous faisons assez rapidement face au dispositif de flics qui empêche en se positionnant, de passer dans les beaux quartiers. Nous prenons rapidement le cours Alsace Lorraine. Un peu énervé.e.s par Macron et les blocages des zones de riches que nous aimons tant repeindre et fracasser, des poubelles s’enflamment assez vite sur le cours tandis que les outils de cuisine retentissent toujours. Casseroles et feux de poubelles sont dès lors les nouveaux compagnons de notre camp. On se retrouve face au cordon de flics qui bloquent la rue du Cerf-Volant où se trouve le commissariat. Ca stagne un peu, ça chante « Tous le monde déteste la Police », des « ACAB ! » à pleins poumons. Un mortier d’artifice explose en l’air au dessus du cordon et les méchant.e.s n’ont pas l’air très rassurés. Un des tirs atterrit sur un balcon et enflamme un peu les plantes et le volet mais, heureusement, s’arrête. La prochaine fois, pensons à viser à l’horizontale (sur des cibles attitrées par exemples) pour éviter ce genre d’accident.

Le cortège continue sa marche déterminée et festive dans la rue Buhan et tous matériaux jugés bons à l’élaboration de belles barricades se retrouvent en feu. Ca gaze pas mal. Nous arrivons place Fernand Lafargue où quelques personnes tentent de désarmer la surveillance de nos quartiers avec des pavés lancés sur une caméra de la Métropole, sans succès malheureusement.(Peut-être venir avec une bonne corde la prochaine fois ?).

La marche continue vers la grande rue commerçante de St-Catherine en faisant des énormes barricades enflammées. Ca gaze encore, le cortège est un peu disloqué mais ça se tient. Les vitres du Decathlon se remplissent d’étoiles, le Jack&Jones aussi. Ca s’affronte au mortier d’artifice et fait flipper les flics qui sont sur le cours Alsace-Lorraine. On remonte la rue St-Cath jusqu’au Cours Victor Hugo, une voiture de police est caillassée. On essaye de revenir vers la mairie mais ça bloque le cours Pasteur et on se fait gazer très fort. Cela n’empêche pas que de nombreuses barricades de poubelles et de trotinettes en feu soient érigées.

Lors de l’avancement du cortège sur le Cours Victor Hugo, beaucoup de panneaux publicitaires sont explosés (Peut-être arriverons nous à ce que les panneaux ne soient plus remplacés comme à Rennes ?). Les flics nous poursuivent difficilement de loin et le cortège se tient. On entend « Macron explosion » tandis que de nombreuses personnes mettent le feu à la banque LCL. Un énorme feu d’ailleurs, bingo. Le bailleurs social InCité se fait fracasser la devanture à coup de bouteilles et de panneaux de signalisations. Ca court un peu et les flics semblent balancer tous les gazs qu’ils peuvent.

Ca respire difficilement mais ça se tient toujours. La Caisse d’Epargne se fait fracasser et tandis qu’à 30 mètres la BAC nous poursuit et qu’on se fait gazer à mort, de gigas feux au croisement de Rue des Faures sont toujours allumés. Le cortège prend rue des Menuts, on observe la BAC se balader dans les rues parallèles mais on se sent pas trop inquiet, ça chante toujours à fond « ACAB ». Alors qu’on revient sur la place St-Michel, on recroise quelques bouts du cortège qui s’étaient un peu dispersés dû aux gazs.

La détermination est telle que nous nous dirigeons joyeusement vers la place des Capucins. Alors qu’il n’y a pas de flics à l’horizon, le cortège se met à chanter « Ola la, Olé lé, mais qu’est-ce qui s’est passé ? La mairie a brûlé ! Ola la, Olé lé, mais qu’est-ce qui va s’passer ? Le comico va brûler ! ». De manière spontanée, des poubelles sont alors ammoncelées sur la porte du Commissariat des Capucins. Comme quoi, la détermination est à son comble à Bordeaux et la répression de ces dernières semaines ne fait peur à personne. L’ambiance et les impressions sont bonnes, quelque chose de beau est en train de naître. Malheureusement, la tentative d’incendie est avortée car le cortège reçoit de forts gazs et que les flics ne sont plus très loin.

Il ne reste alors plus trop grand monde. Un petit contigent soucieux de rendre honneur aux beaux moments passés sur la place de la Victoire s’en va donc vers celle-ci et fait retentir les derniers feux d’artifices dans le ciel, signe d’une belle soirée pré-insurrectionnelle.

Conseils pour les prochaines manifestations : Il semble important de noter que l’on se fait souvent trop vite disperser dans les gazs lacrymos, et ce malgré le fait que les gens commencent à comprendre qu’il ne sert à rien de trop courir car cela provoque des mouvements de foule plutôt flippant. Afin de perséverer dans ces nouvelles manières que l’on a de bouger collectivement et qu’on commence à plutôt bien gérer, pensons à ramener pour soi et chacun.e des lunettes et des masques (ffp2, ffp3) pour tenir dans les gazs et que nos manifestations méga-joyeuses puissent durer un peu plus longtemps.

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