Analyses Sécurité Informatique - Surveillance

De nombreux commerces surveillent illégalement leurs clients


Pour lutter contre les vols à l’étalage, plus de mille magasins utilisent un logiciel de vidéosurveillance algorithmique vendu par la start-up française Veesion. Problème : selon la Quadrature du net, l’usage de cette technologie est illégal.

Entre janvier et août 2022, le ministère de l’Intérieur annonce une hausse de 17 % des vols à l’étalage par rapport à la même période en 2021. Difficile de ne pas faire le lien avec l’inflation : plus 12% sur un an. Pour se prémunir contre ces chapardages, certains magasins et grandes surfaces implantés en France ont fait le choix de s’appuyer sur la vision par ordinateur. Grâce à cette branche de l’intelligence artificielle, le logiciel détecte automatiquement et en temps réel les gestes suspects des clients et ainsi permet aux vigiles – ou à défaut, aux autres employés, d’intervenir rapidement. Selon nos informations, Leclerc, Carrefour, G20, Système U, Biocoop, Kiabi ou encore la Fnac ont tous des magasins clients d’une même société : Veesion.

Créée en 2018 par trois anciens diplômés d’HEC et de Polytechnique, Veesion s’appuie sur le travail d’une centaine de collaborateurs et annonce vouloir « lutter contre le fléau du vol à l’étalage » dans les magasins. Ce phénomène de « démarque inconnue » constitue une perte estimée par la start-up à 100 milliards d’euros par an dans le monde, dont cinq milliards en France. Un chiffre difficile à sourcer mais qui attire les investisseurs. Les fonds d’investissement privés ont senti le filon de ce nouveau marché prometteur et ont alloué à Veesion dix millions d’euros en 2022 pour développer leur activité.

Pour endiguer ce « fléau », la jeune entreprise a su profiter des avancées récentes en intelligence artificielle et notamment dans l’une de ces branches : la vision par ordinateur. Cette dernière repose sur le deep learning, c’est-à-dire le traitement automatisé de grandes quantités d’informations réalisé par des serveurs informatiques – dans le cas présent, des pixels issus d’images de vidéosurveillance. Si de nombreuses sociétés proposent aujourd’hui des logiciels capables de détecter des « objets » (humain, voiture, vélo, trottinette, camion, etc.) et d’en déduire des comportements du type maraudage ou infraction au code de la route, Veesion va plus loin. Afin d’établir une probabilité de vol, la société a non seulement « appris » à son programme informatique à détecter la présence humaine, mais surtout à localiser les parties de son corps (bras, jambes, poitrine, tête). Une seconde analyse algorithmique va détecter la présence d’objets tels que le sac à main, à dos, caddie, casque ou poussette, puis le positionnement des rayons et produits.

Ainsi, le logiciel va, par exemple, détecter le bras d’un individu qui saisit un produit dans « l’objet » rayon et pourra donc déterminer si le bras se dirige ensuite vers le sac à main. Si l’article disparaît du champ de vision, une alerte sera remontée. La start-up n’hésite pas à avancer un taux difficilement vérifiable de 98 % de vols détectés grâce à l’IA. Contactée par StreetPress, la société a refusé de répondre à nos multiples sollicitations. Pour en savoir plus, nous nous sommes présentés comme un responsable de magasin afin de comprendre le fonctionnement de l’application et les arguments de vente qui accompagnent sa commercialisation.

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